Latitude 48. La radio nogentaise. Interview exclusive d'Eric Bagnulo et de Daniel Renard.

On faisait de la radio pour les gens ! Ce qui nous intéressait, c'est que des jeunes nous rejoignent. C'est mettre une équipe sur pied !
Eric Bagnulo.

En 1982....

C'est la Loi Fillioud du nom de Georges Fillioud,  ancien journaliste à Europe 1, ministre de la Communication de François Mitterrand, qui déclare que "la communication audiovisuelle est libre".

Et, c'est cette liberté qui va être à l'origine de la création des radios libres...

Et, plus spécialement, de Latitude 48 à Nogent-le-Roi.

Oui, Latitude 48, comme la position géographique de la ville de Nogent-le-Roi : 

La latitude de Nogent-le-Roi est de 48.649 degrés Nord et la longitude de Nogent-le-Roi est de 1.532 degrés Est.

"Latitude" aussi comme "liberté" précise son créateur Eric Bagnulo.

Ce qui suit résulte de l'interview d'Eric Bagnulo et de Daniel Renard, les fondateurs de Latitude 48, le samedi 20 mars, de 15 heures à 19 heures.

La radio, on peut dire qu'Eric Bagnulo, il l'a vraiment dans la peau !

Dès l'âge de 21 ans, et quand son boulot dans la grande distribution lui permet, il commence à fréquenter les studios des grandes radios parisiennes : Europe 1, RTL...

Il est passionné par les studios, la régie, les animateurs, les grilles de programmes, l'alternance musique/débats/publicité...

Il se souvient encore avec émotion du 2 avril 1974, où le journaliste est arrivé à bout de souffle pour annoncer la mort du président Pompidou. Et où toute la programmation a été interrompue.

Sans doute conseillé par Jean-Pierre Vitel - qui avait la passion de ce métier - Eric enquille par des cours de l'école de Disc Jockey (D.J.).

En 1979, pour Eric, c'est l'armée.

Et...

Après avoir été engagé comme pigiste local à L'Echo Républicain, grâce à M. Antoine de la Maison de la Presse Nogentaise...

Le 2 mars 1982...

Il installe un embryon de radio dans le sous-sol de ses parents au 4, rue du Maréchal Leclerc : "Au début, c'était facile, il fallait juste un petit émetteur et c'était bon, mais, on était dans l'illégalité !"

Juste deux heures de diffusion, Entre 17 h et 19 h.

Et là, le jeu commence entre lui et les Nogentais : "Pour faire la promotion de la radio, on suscitait des appels."

"On" parce que Daniel Renard l'a rejoint !

Très vite, les statuts de la radio (association loi 1901) vont être rédigés par papa Bagnulo. Qui remplit parfaitement la fonction, puisqu'il est comptable.

Cela va permettre de faire reconnaître la radio : "Cette rigueur nous a permis d'être pris un peu plus au sérieux. Il fallait arriver avec de la matière, un dossier."

En deux heures, de la musique et des interventions après chaque disque. Avec un martèlement incessant "Votre nouvelle radio sur Nogent-le-Roi... Rejoignez-nous !"

Cela a suscité beaucoup d'intérêt tout de suite : "On faisait de la radio pour les gens ! Ce qui nous intéressait, c'est que des jeunes nous rejoignent. C'est mettre une équipe sur pied !"

Le créneau 17/19 heures avait été étudié en fonction de la disponibilité des gens pour écouter la radio. "On voulait toucher un maximum de gens qui sortaient du travail, de l'école... Avant les heures de la télévision du soir."

Dans ce but, ils passent un article dans L'Echo et dans La République du Centre.

Et, là, c'est bingo !

L'équipe

La première, c'était Caroline Régnier. Elle venait avec son père, Philippe Régnier de Vacheresses.

Elle était la spécialiste des radios trottoirs.

Elle parcourait le marché de Nogent et signalait les bonnes affaires.

Son père, lui, essayait des voitures et envoyait des commentaires.

Juste après (ou en même temps) il y a eu Jean-Pierre Vitel qui excellait en D.J.

Et Philippe de Chartres. Qui était D.J. dans une boîte du vieux Chartres.

"Le principe, c'était qu'il y ait des animateurs D.J."

Puis le créneau c'est très vite devenu 17 h/20 h.

Au bout d'un an, Papa Bagnulo commençait à lasser : "On se retrouvait à 10 dans 8 mètres carré."

Il en a eu marre de passer pour le jardinier. Et c'est l'ultimatum : "Ou tu montes sur le toit déplacer ton antenne, ou c'est moi qui le fais !"

Bon timing : la municipalité leur propose un local au premier étage de l'ancien hôpital.

En mai/juin 1983, la radio organise des jeux avec des cadeaux offerts par les commerçants.

Il y a eu même un autoradio à gagner grâce au garage de Maintenon.

Et des tickets pour le concert des Rolling Stones à l'Hippodrome d'Auteuil à Paris.

Daniel avait préparé un questionnaire et les gens gagnaient des places.

Au tout début, la radio tourne grâce aux deniers des jeunes pionniers. Puis leur vient l'idée de vendre des auto-collants à 5 Francs.

Et l'élaboration des cartes de membres : "Vous pouviez donner de l'argent à la radio, faire un don, devenir membre."

Ils fonctionnent avec l'U.C. des commerçants nogentais. Pendant les fêtes de Noël, il y a même des hauts parleurs qui relaient la radio dans tout Nogent-le-Roi. Et des cadeaux à gagner.

C'est donnant/donnant : des flashes de pub pour les commerçants contre des cadeaux à gagner pour les auditeurs.

Le Père Noël de Villemeux vient même à la radio.

Le maire de Nogent, Me Michel Beaujouan vient présenter ses voeux.

Jean-Pierre Pasquier, le maire de Saint-Lucien, est particulièrement présent. Il milite pour l'Ordre de Malte.

Et, tous les ans, grâce à JPP, la radio annonce la collecte pour les lépreux, le dernier dimanche de janvier.

D'autres maires du canton suivent : François Boulerand (Faverolles), Gérard Dutilleul (Villemeux), Jean-Jacques Guet (Chaudon), etc...

Jean-Pierre Pasquier (Maire de Saint-Lucien) sur le grill...

Les grilles de programmes

Du lundi au samedi :

- De 7 heures à 10 heures : Les Matinales.

Avec Eric Bagnulo.

Musiques. Horoscopes du jour. Météo. Invités (élus, associations sportives, etc...)-

M. Antoine lui fournira gratuitement les trois journaux locaux de 1983 à 1988.

Le fait de bosser en local pour L'Echo facilite les choses pour Eric.

Ainsi, il obtient - au moment de la déclaration de février - un rendez-vous à l'antenne avec le Centre des Impôts de Dreux qui viennent au studio répondre aux questions des gens.

- De 10 heures à 11 heures : Programmes à la carte.

Listes des chansons que les auditeurs souhaitent écouter.

"De vous à nous " : style "Les auditeurs ont la parole !"

Les auditeurs demandent de traiter des sujets qui les tiennent à coeur.

Daniel Renard anime "Doublez le disque" qui, comme son nom l'indique, double un disque à la demande.

- De 11 heures à 14 heures : Music Burger avec Thierry Honoré.

Ils se débrouillent pour interviewer des célébrités quand ils passent au Roller Star System.

Un club qui peut contenir jusqu'à 2000 personnes.

Et là, c'est Gilbert Montagné, Rita Mitsuko, Village People...

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Survient alors le fameux épisode "Jean-Luc Lahaye".

A Feucherolles (Néron), Patrick Rouxel est le producteur de Jean-Luc Lahaye.

Un dimanche...

Patrick Rouxel téléphone à la radio pour savoir s'il peut passer avec Jean-Luc Lahaye.

C'est l'époque de "Papa chanteur"...

De "Lahaye d'honneur" et de son livre "Sans famille".

C'est Fabrice Josse qui va s'y coller ce jour-là.

Lahaye arrive de Feucherolles en moto et sans casque. Il se fait serrer par les gendarmes. Qui seront finalement indulgents.

Mais l'émission est un réel succès !

Et les Nogentais en parlent encore.

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- De 14 heures à 16 heures : "Pas de fumée sans feu" avec Véronique Pontalier.

Une émission littéraire avec conseils de lectures. Et possibilité pour les auditeurs de gagner des livres.

Le tout en liaison avec la libraire de la rue Rotrou à Dreux : Mme Valembras de Brocéliande.

- De 17 heures à 19 heures : Hit Parade avec Thierry Honoré.

Avec, le lundi, Nicole Guée qui anime "Animalement vôtre".

- De 20 heures à 21 heures : Play List avec Eric Bagnulo.

Des nouveautés pas encore classées dans le Hit Parade.

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Le mardi soir de 19 heures à 20 heures : La voix du Portugal avec Fernando Agostini.

Et de 20 heures à 21 heures : Fuzz avec Daniel Renard.

Musique Rock, Rythm and Blues.

Jean-Pierre Binois. Professeur d'Histoire au Collège Jean Moulin.

- Le mercredi matin, de 11 heures à midi : Tohu-Bahut.

Des ateliers extra-scolaires avec les collégiens de Jean Moulin.

Cornaqués par leur professeur d'Histoire : Jean-Pierre Binois.

"Les collégiens venaient, ils préparaient leurs sujets. Ils ont même invité Christian Zuber de "Caméra au poing"".

Il était de Châteauneuf-en-Thymerais.

- Le mercredi de 12 heures à 13 heures : "A chacun, sa part de rêves" avec Roger Buisson.

Interviews des gens du canton et musiques.

- Paulette Buisson : "De la musique avant toutes choses".

Avec un grand choix de musiques classiques.

Ces deux émissions sont à nouveau programmées le samedi soir.

- Deux jeunes issus du collège : Virginie Robert pour "Grand Ecran".

Et Pascal Vincent pour les chroniques sportives et la rubrique hippique.

"Au total, une centaine de personnes sont venues participer" affirme Eric Bagnulo.

Photo Nicole Guée pour La République du Centre.

De gauche à droite :

Roger Buisson (RB), Daniel Hunault, Fabrice Josse (avec la moustache), Thierry Hunault, Martial Guffroy (blouson ouvert), Pascal Vincent (les pieds sur la chaise), Virginie Robert (la jolie avec le pull rayé), derrière elle : Christine Guée (la fille de Nicole), Patrick Pontalier, Caroline Regnier, Daniel Renard, Thierry Honoré, le TUC (le seul rémunéré du groupe), Eric Bagnulo, Véronique Pontalier (avec sa fille sur les genoux).

- Le mercredi de 15 heures à 16 heures : Embarquement immédiat.

Emission sur les voyages. Avec Sabine Joigny.

- De 16 heures à 19 heures : Le Hit Parade de Thierry Honoré.

- De 20 heures à 21 heures : Ciné Top.

Qui parlait des films qui sortaient le jour même.

Eric avait récupéré des extraits et des bandes sons.

Le jeudi soir : de 20 heures à 21 heures : "Les doigts dans la prise" de Daniel Renard.

Rock Metal : "Là, ça envoyait !"

Le vendredi soir : La musique du week-end.

De la musique pour faire la fête.

Le samedi soir : "Les chemins de traverses" de Patrick Pontalier.

"C'était le seul jour de la semaine qui clôturait à 22 heures."

Patrick Pontalier, fan de musique Country, de Cabrel et de musique celtique.

- Le samedi matin, de 10 heures à midi : "Magazine 48" avec Caroline Regnier.

- Le samedi, de 12 heures à 13 heures : "Fugue en rires".

Une émission sur les humoristes. Avec chansons et sketches.

Animée par Pascal Vincent.

Auquel a succédé Thierry Dumont (S.P. Volontaire avec Martial Guffroy).

- Le samedi après-midi de 14 heures à 16 heures : "Les meilleurs Hits en boîte de nuit".

- Le samedi de 16 heures à 19 heures : "Croque Vinyle" de Fabrice Josse.

- Le dimanche, de 10 heures à 12 heures : "Les dédicaces".

"C'était de la folie. Daniel était surbooké. Au bout d'une heure, il décrochait le téléphone. ça commençait à sonner même avant l'émission !"

- Le dimanche de 19 heures à 20 heures : "Jazz Butane"

"On a donné à tous ceux qui le souhaitaient qu'ils s'épanouissent à travers cette expérience" conclut Eric Bagnulo.

Et Daniel Renard d'ajouter : "On était au bon endroit au bon moment, on était dans le bon timing !"

Luc Chaillot, de Lormaye, qui était, à l'époque, dans une école de journalisme de Tours, se joint à eux pour la chronique d'infos locales.

Est-ce le Luc Chaillot qui crève l'écran à L'Est Républicain ? (à confirmer)

Jean-Marc Josse est devenu rédacteur en chef à Radio Vieille Eglise.

Virginie Robert est aujourd'hui une attachée de presse qui compte dans le monde parisien de l'édition. Chez L'Harmattan.

Cette belle aventure a pris fin le 14 février 1988.

Eric Bagnulo de conclure : "D'un seul coup, d'un seul, après des années de travail, ça avait pris, il fallait passer à la vitesse supérieure et embaucher du monde pour des reportages à l'antenne, jeux, etc..."

Il n'y a pas eu de vitesse supérieure.

No regrets.

A la fin de l'interview...

On se prend tous trois à rêver d'une exposition nogentaise qui réunirait tous les anciens de la radio...

En proposant des panneaux qui retraceraient cette incroyable aventure.

Pourquoi pas ?

Liliane Langellier

P.S. Merci à Paulette Buisson pour les photos couleurs aimablement prêtées.

Mémoires de Nogentais :

Patricia Mithouard ouvre le bal :

"Le mercredi matin, les élèves du collège avait leur émission "Tohu- bahut " avec Mr Binois, prof d'histoire-géo !

Je me souviens d'un premier avril, où nous avions fait croire qu'il y avait un projet pour le métro à Nogent avec les stations Charles de Gaulle-Etoile !

Le téléphone de la radio ne cessait pas de sonner, nous avions tous bien ri !"

Brigitte Secon est émue :

 "Je me souviens être passée à l'antenne comme animation durant la Ruche de Nogent. C'était la classe !"

Michaël Zmudz ajoute : 

"Oui la belle époque des radios libres, le studio était au dernier niveau de l'ancien hôpital. Quand ils ont enlevé la grande antenne, c'était triste, et, c'est devenu une salle de répétition pour Yan Lem."

et Jean-Pierre Poidevin se souvient :

"Oui je me souviens bien d’Eric l’animateur, cette radio FM était culte, c’était mon voisin et j’allais de temps à autre dans le studio qui se trouvait dans le sous-sol. Bien entendu la visite de Jean-Luc Lahaye est un des points forts de cette radio."

Pascal Chaillou, lui, nous parle des dédicaces. Et des musiques que la radio passait sur demande.

Martine Deschamps repense avec émotion aux séances dédicaces musicales du dimanche matin.

Véronique Pontalier était de l'aventure : 

"Monsieur Buisson dit R.B. présentait chaque samedi "A chacun sa part de rêve !", comptes-rendus de ses rencontres avec des anciens de la région et faisait revivre les bergers, les meuniers, et d'autres savoir-faire presque oubliés ; côté musique, c'était rendez-vous avec les années 40, 50, les débuts de Juliette Gréco, de Brassens, de Léo Ferré...

Madame Buisson, de sa voix si mélodieuse, nous présentait des morceaux de musique classique pour finir notre dimanche tout en douceur.

LATITUDE 48 était une radio associative avec pour président Eric Bagnulo qui assurait des matinales très dynamiques avec le concours des journaux locaux. 

Eric était aussi pigiste pour L'Echo Républicain et D.J. en boîte...

Daniel Renard était trésorier et animait une émission de rock plutôt métal. 

Patrick Pontalier, secrétaire et animateur de l'émission du samedi soir : "Les Chemins de Traverse" qui nous faisait voyager depuis les Etats-Unis et la musique country, la pop, jusqu'à la France et ses compositeurs rock and roll : Cabrel, Thiephaine, Charlélie Couture...

Fabrice Josse était plutôt funky. 

Thierry Honoré animait tous les après-midis de 16h à 19h avec les nouveautés musicales, variété surtout.

Pascal Vincent présentait des humoristes. Nous avions aussi une émission cinéma où l'on pouvait entendre des extraits des films à l'affiche.

Quant à moi je présentais une émission littéraire grand public. Avec l'aide de la librairie Brocéliande à Dreux [NDLR Mme Valembras] et des éditeurs parisiens, je pouvais présenter les livres nouveaux et en faire gagner grâce à de petits jeux.

La regrettée Nicole Guée (dont la fille figure sur la photo), présidente de la SPDA de Serazereux, présentait bien sûr une émission sur les animaux et je me souviens encore de ce débat avec un représentant de la fédération des chasseurs !.."