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Chez Jeannette Fleurs

“Je m'intéresse à tout, je n'y peux rien.” Paul Valéry. Poussez la porte de la boutique : plus de 2.200 articles.

L'Avent d'avant...

Chez nous, c'était la tradition.

Ou plutôt les traditions...

Décembre était un mois fébrile.

Très fébrile.

Tout commençait par la choucroute familiale.

Je m'étais toujours posée la question de ce plat pour une fille d'aveyronnais, bougnat de son état. Et puis j'ai réalisé - très récemment - les origines lorraines de ma grand-mère maternelle, Elisa Gantner.

La choucroute, c'était déjà une cérémonie en soi.

Les ingrédients étaient achetés chez Schmid, Gare de l'Est. Et nulle part ailleurs. La choucroute était crue et cuisait sur la cuisinière plusieurs jours d'affilée.

Une tradition.

C'était toujours début décembre cette réunion de famille.

Car, après, avec la vente des sapins de Noël, ce n'était plus possible.

Le premier dimanche de l'Avent, Jeannette avait installé la crèche. Je vois encore son ange bleu au-dessus de son toit de paille.

Elle tenait la moitié de la vitrine.

Parce que Noël, c'était d'abord la crèche.

Et sans Enfant Jésus jusque dans la nuit du 24 décembre.

Il y avait deux sapins.

Le sapin de la boutique. Vert. Avec des boules allemandes qui s'ouvraient pour offrir des friandises. Et tout plein de noeuds rouges.

Et le sapin de la salle à manger. Blanc, celui-là. Avec tout un tas de fatras entassé depuis des années.

Il était placé sur la table marocaine.

Un jour, notre chien Tom, dont le panier logeait dessous, s'est gratté un peu fort. La table s'est repliée. Le plateau en cuivre a basculé. Et nous avons vu arriver un chien décoré de la tête à la queue.

Mais, ça ne s'arrêtait pas là.

Jeannette assumait gratuitement les fleurs et décorations de l'église Sainte-Thérèse de l'Enfant Jésus à Boulogne Billancourt, notre paroisse, et celles de mon pensionnat.

Il fallait que tout soit mis en place le 15. Car, après, c'est un autre ballet qui commençait.

Les sapins.

Sortis à 6 heures du matin, à se pavaner sur le trottoir - oui, à l'époque, il n'y avait pas de supermarché et même les ouvriers achetaient leurs sapins chez leur fleuriste - les sapins verts étaient très fiers.

Les sapins blancs gardaient un peu leurs distances.

Plus chers et plus fragiles, ils gardaient aussi leur emballage plastique.

Il y avait le houx. En vrac. Et en longues branches.

Et le gui.

Ah le gui ! Je ne sais quelle superstition habitait ma Jeannette mais le gui ne devait pas rentrer chez nous. Et elle refusait d'y toucher.

De même qu'elle jetait toute carte postale de Noël avec du gui.

Chez elle, ça portait malheur.

Mais comme il fallait bien en vendre, c'était les vendeuses qui se débrouillaient à l'extérieur.

Sapins sortis le matin. Sapins rentrés le soir.

Les bras griffés, c'est Fernand qui assumait.

Il n'avait d'ailleurs pas son pareil pour vous embobiner la bourgeoise en lui secouant un sapin sous le nez pour lui montrer ses beaux branchages.

Et leur ajuster au pied ce bois en croix qui le maintenait droit.

Les couronnes de Noël étaient faites à la maison.

Les préparations pour les centres de tables aussi.

Enfin, c'était l'usine du Père Noël sous le regard protecteur du petit Jésus bien caché attendant sa sortie solennelle.

Plus tard, vinrent les poinsettias. Mais ça, c'était après.

Jeannette pouvait vous réaliser en un tour de main un superbe noeud rouge qu'elle accrochait dans les épines vertes.

Parce que Noël, à l'époque, c'était rouge et vert.

Un peu doré aussi, pour les clients plus exigeants.

J'ai toutes ces couleurs dans la tête.

Je sens encore toutes ces odeurs.

Après, bien plus tard, on pouvait décorer "La Louise" car c'était une belle femme cette maison-là.

Avec une grande cheminée.

Et un portail qui permettait l'accrochage d'énormes rubans rouges et or.

Maintenant....

Maintenant mon espace est restreint.

Mais ma mémoire est féroce.

Et mes bouffées d'enfance toujours présentes.

Le sapin blanc est là depuis dimanche. Il trône avec ses boules "Le Petit Prince".

La crèche a réussi à se caser devant la collection blanche de ma bibliothèque.

Et pour couronner le tout, j'ai trouvé chez ma petite fleuriste un coffret de parfum d'ambiance "Au pied du sapin".

Cette dernière coquetterie n'existait pas avant. Mais elle me ravit, car je suis dans l'odeur de mon enfance.

J'ai une petite terrasse. Avec deux grands arbres en terre.

Ils seront aussi décorés.

J'ai déjà choisi et retenu de tout petits sapins blancs qui viendront se faire planter dans mes jardinières avec des petites boules de couleurs.

Le 8 décembre au soir, comme chaque année, je laisserai jusqu'à minuit brûler mes lampes de sabbat sur le rebord de la fenêtre de ma cuisine.

L'Immaculée Conception, c'est pas seulement grandiose à Lyon, c'est grandiose dans tous les coeurs de ceux qui prient.

Et, pour tout plein de raisons, c'est ma fête préférée.

Si, je sais, les lumières...

Les petites bougies partout.

Celles que nous portions en chantant dans notre uniforme bleu et blanc.

Et puis, le savez-vous seulement, le 13 décembre, à la Sainte Luce, les jours rallongent du saut d'une puce.

La lumière...

Celle que j'ai gardée dans mes yeux d'enfants éblouis au matin de Noël.

Celles qui clignotaient quand Fernand chantait en ténor solo "Minuit Chrétien" au pensionnat.

La lumière...

Celle qui continue à éclairer le chemin de ma vie.

Même et surtout s'il est plus dur et plus pentu.

La lumière....

La lumière d'une enfance à nulle autre pareille.

Liliane Langellier

Petit sapin...

Petit sapin...

Petite crèche de Noël...

Petite crèche de Noël...

Petits Pères Noël...

Petits Pères Noël...

Couronne de l'Avent. Ma petite fleuriste a le tour de main, non ?

Couronne de l'Avent. Ma petite fleuriste a le tour de main, non ?

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