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Chez Jeannette Fleurs

“Je m'intéresse à tout, je n'y peux rien.” Paul Valéry. Poussez la porte de la boutique : plus de 2.400 articles.

Maurice Chorenslup 14 septembre 1936 - 15 janvier 2023. L'incroyable aventure de la Western House...

Pour nous, la guerre de Sécession n'est pas terminée !

Maurice Chorenslup, le créateur de la Western House, nous a quittés le 15 janvier dernier.

Il était né le 14 septembre 1936.

La Western House...

J'ai bossé dans ses deux boutiques : avenue de la Grande Armée et Rue des Canettes.

Je me souviens d'y avoir servi Claire Brétécher, Catherine Deneuve, Marcello Mastroianni (pour Chiara), Jean-Pierre Kalfon, Eddy Mitchell...

Je me souviens de Gérard Lanvin qui plaisait fort aux bourgeoises du XVIe arrondissement...

Et des portes "Saloon" des salons d'essayage du premier étage.

Je me souviens de mes nombreuses paires de Santiags et de mon joli gilet à franges en daim marron...

Je me souviens, entre autres, d'un fabuleux week-end de Pâques 1978 chez les de Filippi à Coutainville. Où Maurice avait apporté plein de films américains que nous avons visionnés avec bonheur.

Je me souviens que, chaque fois, que j'allais voir Maurice chez lui, dans le XVIIe, il branchait le film "Gone With The Wind" pour que, rêvant d'être "Ma'me Sca'lett", j'entende la musique d'ouverture de Max Steiner.

Je me souviens de son taxi jaune checker dans lequel nous sommes allés jusqu'à Chaudon. Alors qu'il envisageait d'ouvrir avec moi une boutique Western à Dreux.

 

 

Retour sur l'incroyable aventure de la Western House.

Pour les passionnés de western, il n’est pas toujours facile de s’équiper après la Seconde Guerre mondiale. Peu de magasins existent ou alors ils n’ont pas le matériel désiré.

Heureusement, il existe quelques enseignes dans Paris et en province, parmi elles, le magasin WESTERN HOUSE.


Avant d’ouvrir au numéro 13 avenue de la Grande Armée, Maurice CHORENSLUP travaillait avec son beau-frère à la boutique STELLA.

La boutique était située au « Marché aux Puces » à Saint-Ouen et avait ouvert après la Seconde Guerre mondiale. Le beau-frère de Maurice avait remarqué l’engouement de la nouvelle génération pour les bottes américaine. Il a donc fait fabriquer en Amérique un premier modèle à « bouts carrés et talons de monte ». Devant le succès de cette paire de bottes, il a continué à faire venir du matériel western principalement des Etats-Unis et du Mexique.

Dans le magasin STELLA, on trouvait donc toutes sortes de bottes américaines et mexicaines, des chaps en cuir, des chapeaux, des ceintures et même des selles californiennes et mexicaines.

Passionné de cinéma et fasciné par l’American way of life, Maurice CHORENSLUP rêve d’ouvrir un magasin dédié au western dans Paris même. Pour cela, il va prendre contact avec des fabricants américains grâce aux adresses disponibles dans la revue Western Horseman. Cette démarche lui permet de constituer un petit stock suffisant pour ouvrir une boutique. Entre temps, il avait réussi à trouver un local libre au numéro 13 de l’avenue de la Grande Armée dans le 16e arrondissement. L’inauguration est programmée le 3 décembre 1964, la même soirée que le concert d’Hugues Aufray à l’Olympia. Malgré un pari risqué, c’est une réussite. Une soirée inoubliable où s’est retrouvé tout le western parisien : Joe Hamman, Georges Fronval, Gabe Chen, le Sheriff Dad, Serge Holtz, Gilbert Gunhold…et tant d’autres encore.

 

 

Le 4 décembre 1964, c’est l’ouverture de WESTERN HOUSE, « le premier bazar américain » installé dans Paris. La Western Gazette lui consacre quatre pages dans son numéro de décembre 1964.

Façades du magasin de nuit et durant les émeutes de 68, collection Maurice Chorenslup.

« Dès le premier mois d’ouverture, WESTERN HOUSE connait un succès immédiat, drainant une foule d’inconditionnels qui viennent là autant pour la marchandise que pour l’ambiance de la boutique. […] Il était fréquent de voir les habitués venir passer bénévolement la journée avant de la Grande Armée sans autre but que de donner un coup de main et de se donner l’illusion de vivre un après-midi à l’ombre des cactus au fin fond du Texas ». (1)
 


(1) Morris W. Chandler, Pas de bandana pour Miss Blandish, livret édité par Maurice Chorenslup et Didier Mercier à l’occasion du 20e anniversaire de la boutique en 1984, p. 15.

Intérieur du magasin, collection Maurice Chorenslup.

Les clients peuvent trouver tout ce dont ils rêvent dans la boutique : des jeans, des chemises, des bottes, bien-sûr mais aussi des ceintures, des boucles, des chapeaux, des foulards, du matériel d’équitation, des chaps, des ceintures d’armes, des éperons, des lassos et même des selles qui peuvent s’acheter à crédit grâce à un accord passé avec la maison Cetelem à partir de 1968.

Dès janvier 1965, la boutique accueille au sous-sol l’Association Western de France, présidée par Gilbert Gunhold dont le secrétaire Sheriff Dad tient les permanences régulièrement.

Avril 1965, Maurice Chorenslup et son beau-frère s’envolent pour les Etats-Unis afin de faire le tour des fabricants et de passer les commandes pour le magasin. Ils retourneront plusieurs fois par an au Texas et au Mexique pour constituer leur collection, choisir le matériel. En 1969, Maurice rencontre Tony Lama Junior à El Paso, une collaboration qui durera très longtemps.

Maurice et Tony Lama Junior à El Paso en 1969, collection Maurice Chorenslup.

En 1970, une seconde boutique ouvre au 23 rue des Canettes dans le 6e arrondissement.

D’autres établissements verront le jour, parfois de façon éphémère et d’autres plus durables :

- Un magasin à Saint-Tropez le temps d’un été,
- un comptoir à Montpellier tenu par François et Marité Girbaud aux environs de 69/71,
- une « western boutique » dans le centre commercial de Parly 2 dans les Yvelines à partir des années 70
- Et même une enseigne à Prague.
Western House et ses annexes compteront jusqu’à 25 vendeurs.

Cependant, la véritable ambiance western et familiale reste et demeure au 13 avenue de la Grande Armée. Dans le premier magasin, les habitués de toujours passent régulièrement parmi eux Johnny Halliday, fidèle de la première heure.

 

Dans le livre parodique consacré au 20e anniversaire du magasin, Maurice Chorenslup a rassemblé les signatures de toutes les personnalités qui ont fréquenté le magasin. Des dizaines et dizaines d’artistes, acteurs, chanteurs, humoristes, français et étrangers venaient acheter leur jean et leurs bottes à Western House.

En 2000, le magasin a fermé ses portes définitivement après 36 années d’existence néanmoins il reste dans les esprits LA boutique western où l’on pouvait échanger, parler de sa passion, se rencontrer, et finalement réaliser son rêve américain.

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Addenda

Sonia à New-York :

Gérard Lanvin

Parmi les vendeurs...

Il y a eu aussi Gérard Lanvin et sa première épouse la ravissante Dominique Quilichini, devenue, après leur divorce, l'épouse du chanteur Renaud..

Marithé et François Girbaud.

Marithé Bachellerie et François Girbaud est un duo de stylistes qui a donné son nom à la marque (Marithé + François Girbaud).

Biographies

Marithé Bachellerie est née en 1942 à Lyon. Son père est un sportif et champion cycliste qui a fait plusieurs fois le Tour de France. Elle fréquente les écoles religieuses, se passionne pour le dessin et rêve de devenir actrice. Elle marque sa volonté de se démarquer en partant découvrir le monde. Passionnée de tricot, elle commence à confectionner des ponchos pour elle puis pour ses amis et enfin pour Western House tout en menant une vie entourée d’artistes.

Décembre 1971. Chouket en costume de jeans Marité et François Girbaud au Taj Mahal à Agra.

François Girbaud, quant à lui, est né en 1945 à Mazamet (Tarn), capitale mondiale du délainage et centre actif du traitement des peaux, dans une famille d'ouvriers de la vallée de l'Arnette. Il apprend le dessin industriel, travaille comme ferronnier puis dans une fabrique de valise. Le rock fait partie de son rêve et le pousse à quitter ses racines. En 1963, il découvre le Golf Drouot et les puces qui l’amènent vers Western House. Ce lieu est le premier endroit du genre à Paris pour l’importation de vêtements U.S. et la panoplie du parfait cow-boy. Il habille les vedettes, attire les acheteurs du monde entier qui sont à la recherche du mythe de l’authentique.

Ils se rencontrent en 1967 à Saint-Tropez chez Western House.

 

In "Une histoire du blue-jean" de Daniel Friedmann

 

L’époque de la première communauté où tout se partage et où le travail s’effectue en groupe. Marithé et François se démarquent très vite et démarrent une association qui ne faillira pas. Ils connaissent un formidable succès avec leurs jeans et pénètrent le marché des États-Unis lorsqu'un de leur vêtement est porté par Jennifer Beals dans le film Flashdance, en 1982. 

 

 
 
 

Portrait dans Lui de mars 1981 

MAURICE CHORENSLUP

Si vous voyez passer dans Paris un taxi jaune à damiers directement importé de Manhattan ne tentez pas de l'arrêter. Ce n'est pas un chauffeur new-yorkais, mais Maurice Chorenslup, grâce à qui, depuis 1964, les Parisiens qui s'habillent chez Western House jouent aux cow-boys et aux Indiens... Le comble, c'est qu'il va bientôt s'installer à New York et à Los Angeles et vendre aux Américains des tenues qui, il y a peu de temps encore, leur aurait paru aussi déplacées qu'une blouse de paysan et des sabots sur les Champs-Elysées ! L'idée est venue à Maurice Chorenslup qui, après des études de droit, « s'était mis dans la chaussure » —, parce que son beau-frère vendait de temps en temps des chapeaux et des bottes de cow-boy aux Puces. Un copain leur fait la décoration d'après des bouquins de Brentano's, et ils lancent la boutique en faisant une inauguration mémorable. « On avait prévu de « faire » cinquante briques on a fait le triple. Alors, on a continué ! » Western House prospère, traversant successivement tous les courants, des Nordistes aux Sudistes (« Pour nous, la guerre de Sécession n'est pas terminée ! ») , des hippies aux Indiens, à une époque où faire porter des jeans et des tee-shirts University'aux gens du XVIe n'avait rien d'évident. Les gens du show biz connaissent bien l'endroit, les Rolling Stones (et le comte de Paris) sont venus, et la maison est très fière, entre autres, d'avoir été fournisseur de Jean-Pierre Melville en Stetsons... Maurice Chorenslup se souvient aussi avec émotion que, le jour de la sortie d'Il était une fois dans l'Ouest, les gens sont venus directement chercher à la boutique les « cache-poussière » qui, fabriqués dès la nuit suivante, s'étaient vendus à deux mille exemplaires... Passionné par la recherche de nouveaux produits Je n'ai jamais voulu être un distributeur », il s'apprête à ouvrir deux nouvelles boutiques à Paris et quatre en province ce qui fera neuf en tout. Avec vingt-trois personnes et dix millions de chiffre en 1980, il continue à innover : témoins, ses vitrines-vidéo...

 

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