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Chez Jeannette Fleurs

“Je m'intéresse à tout, je n'y peux rien.” Paul Valéry. Poussez la porte de la boutique : plus de 2.200 articles.

Sissi et François-Joseph, la sombre vérité derrière le conte de fées...

Mais pourquoi rêve-t-on toutes (et tous) du prince charmant ? Romy Schneider, ses robes somptueuses, ses diadèmes et son teint de porcelaine y sont certainement pour quelque chose… À force de rediffusions de la célèbre trilogie d’Ernst Marischka – durant les vacances de Noël comme d’été, personne ne peut y échapper –, on a cru que toutes les histoires d’amour avaient la grâce et la magie de celle de Sissiet de François-Joseph, son « Franz » chéri. Dans le premier volet de la saga, le jeune et fringant empereur d’Autriche rencontre une délicieuse inconnue qui gambade dans la campagne. Il en tombe immédiatement amoureux. Il ne se doute pas alors qu’il s’agit de sa cousine Sissi, sœur de celle qu’il doit normalement épouser, Hélène. Ce n’est que le soir, lors d’un grand bal, qu’il comprend sa méprise. Il demande alors à sa mère de changer de promise et de dire « oui » à la fougueuse Sissi.

Dans la réalité, la véritable histoire de Franz et Sissi a en effet débuté dans ce même parfum de magie. Les chroniqueurs de l’époque relatent que lors du bal donné en l’honneur d’Hélène, fille de Ludovica de Bavière, l’empereur n’a d’yeux que pour Élisabeth, dite Sissi. Celle-ci sait le séduire par son naturel et sa gentille maladresse : plutôt que de lui faire la révérence, comme l’exige le protocole, elle lui tend la main. Ce qui ne manque pas de faire tressaillir l’archiduchesse Sophie mais de faire sourire François-Joseph. Ce soir-là, il offre donc le bouquet du cotillon, et tous ses autres bouquets, à Élisabeth, et n’accorde de danse à aucune autre. On pourrait donc croire au coup de foudre, mais ce bal à Ischl sera le paroxysme de la passion entre les deux futurs fiancés. Dès le lendemain, plus rien ne sera aussi enchanteur.

Suis-moi, je te fuis…

Comme le souligne Jean des Cars, le grand historien des dynasties européennes, dans le sublime ouvrage François-Joseph et Sissi, le devoir et la rébellion, l’union de ces deux cousins était, sans nul doute, « le mariage des contraires ». Sissi n’a jamais aimé Vienne, ses palais, sa cour et ses trop exigeantes conventions, alors que Franz, en parfait bureaucrate, est particulièrement attaché à tout ce décorum. Les deux époux se voient d’ailleurs rarement, tant leurs rythmes de vie sont différents. Une fois sa longue journée de travail terminée, l’empereur rentre se coucher, tandis qu’Élisabeth sort s’amuser. Elle organise des soirées et est rarement levée quand Franz part, dès l’aube, à la chasse. On ne doute pas que François-Joseph soit amoureux de Sissi – et qu’elle l'aime ou l’ait aimé en retour – mais ils ne se comprennent pas l’un et l’autre. L’impératrice est une aventurière, éprise de grands espaces et de voyages, alors que l’empereur n’est à son aise que dans le confort de son palais.

Quelques jours seulement après son mariage, Élisabeth se sent déjà étouffée par son nouveau statut. « Je me suis réveillée dans une prison, les mains chargées de chaînes, et ma nostalgie s’accroît toujours, et toi liberté, tu me fus ravie », écrit-elle dans un poème, durant sa lune de miel dans la résidence estivale de Laxenburg. De son côté, François-Joseph souffre d’être aussi souvent abandonné par sa femme, qui part soigner sa tuberculose – ou peut-être sa lassitude – à Madère, Corfou et Venise.

Ma maîtresse est une actrice

Plusieurs rumeurs d’infidélité ont jalonné l’histoire de Sissi et François-Joseph. L’une d’elles est d’ailleurs à l’origine de leur première crise conjugale. Après les noces impériales, il se murmure dans les couloirs de la Hofburg que François-Joseph serait retombé dans les bras d’une comtesse polonaise qu’il fréquentait durant sa jeunesse. Aussi, la presse croit savoir que l’impératrice marivaude avec le comte Andrassy, le Premier ministre du Royaume de Hongrie. On raconte même que le séduisant aristocrate serait le père de Marie-Valérie, dernière fille de Sissi. Mais la ressemblance entre la benjamine et l’empereur François-Joseph est telle que les soupçons sont vite dissipés. Il est vrai pourtant que l’impératrice – couronnée reine de Hongrie – aime passer du bon temps dans le château de Gödöllő, qui lui a été offert par son nouveau peuple et en particulier par Andrassy.

Aucun doute pourtant que François-Joseph a un jour trompé Sissi, puisque c’est elle qui lui a suggéré de prendre une maîtresse. Consciente de la solitude dans laquelle elle laissait régulièrement son époux, l’impératrice aurait choisi elle-même « sa remplaçante », comme l’explique Jean des Cars. Lors d’une représentation du Songe d’une nuit d’été, l’empereur est charmé par l’interprète d’Hermia, la comédienne Katharina Schratt, qu’il avait déjà croisée au théâtre. Sissi s’aperçoit immédiatement du penchant de son « Franzie » et décide de lui organiser une rencontre avec l’actrice. Trois jours après cette présentation officielle, l’empereur écrit sa première lettre à Katharina. Sissi peut donc le quitter l’esprit tranquille : Franz ne dormira plus jamais seul… Bien entendu, elle surveille de près cet adultère, allant jusqu’à prodiguer des conseils minceur à la « deuxième femme », afin que celle-ci ne se laisse pas aller.

Après le décès de Sissi, assassinée par un anarchiste le 10 septembre 1898, Katharina Schratt accompagne François-Joseph dans son triste deuil. L’empereur ne se remet pas de la disparition de cette femme qu’il n’a peut-être pas su apprécier à sa juste valeur. Pourtant, même dans la mort, le couple connaît un « ultime désaccord », comme le précise Jean des Cars. L’impératrice souhaitait être inhumée à Corfou, mais l’empereur préférera respecter le protocole plutôt que cette dernière volonté. Il la fit enterrer dans la Crypte des Capucins, nécropole des Hasbourg à Vienne. Cette ville qu’elle avait toujours détestée…

 

**Pour en savoir plus :**François-Joseph et Sissi, le devoir et la rébellion, de Jean des Cars, Éditions Perrin.

 

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