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Chez Jeannette Fleurs

“Je m'intéresse à tout, je n'y peux rien.” Paul Valéry. Poussez la porte de la boutique : plus de 1.700 articles.

Les mystères de la mort de Marie-France Pisier

L’actrice était révoltée contre Olivier Duhamel, accusé d’inceste sur son neveu. Y a-t-il un lien entre ce secret de famille et sa mort étrange en 2011 ? L’enquête des gendarmes de l’époque, que nous révélons, penche pour un suicide, faute d’autre explication. Mais ses proches n’y croient pas.

« Bonjour, j’habite à Saint-Cyr-sur-Mer, on vient de retrouver une personne dans une piscine.– Inconsciente ? A quel endroit ?– Plus qu’inconsciente […].– C’est une femme ?– Une femme.– Vous l’avez sortie ?– Non, non, on l’a pas sortie.– Essayez de la sortir déjà.– On va essayer de la sortir, oui d’accord. Mais il y a un moment qu’elle est dedans apparemment. On l’a retrouvée en pleine nuit. Vous voulez que j’essaye de la sortir quand même ?– Ben oui, ce serait bien.– D’accord. 

Il est 4 heures du matin passées de deux minutes, ce dimanche 24 avril 2011. Frédéric K., le gardien de la propriété, raccroche. Les pompiers du Var se mettent en route. Ce sont eux qui sortiront de la piscine le corps sans vie de l’actrice Marie-France Pisier, si bizarrement enchevêtré dans une lourde chaise en fer forgé. Son mari, Thierry Funck-Brentano, l’a découverte une demi-heure plus tôt, est allé réveiller le gardien en hurlant. Depuis, il répète en boucle : « C’est une catastrophe, c’est un cauchemar. » Une fois le décès prononcé, à 7 heures du matin, il déclarera ceci sur procès-verbal :

« J’ai d’abord hésité à plonger. Je me suis ravisé parce que mon épouse était complètement inerte et qu’il n’y avait aucune bulle, synonyme de respiration, qui remontait en surface. J’ai compris que, manifestement, cela ne venait pas de se passer.L’incongruité de cette chaise en dessous de mon épouse m’a peut-être aussi fait dire qu’il valait mieux que je ne touche à rien. »En fait, le corps n’est pas au-dessus de la chaise mais coincé dans la structure, flottant entre deux eaux, ni au fond ni en surface. A l’aide d’une perche, il essaiera, en vain, de le ramener vers le bord. « J’étais fou d’horreur », dira-t-il.

Que s’est-il passé cette nuit du 23 au 24 avril dans la propriété de Saint-Cyr-sur-Mer où le couple était venu passer le week-end pour superviser des travaux de réfection de la terrasse ? Accident ? Suicide ? Meurtre ? Tous les scénarios ont été étudiés par les gendarmes, qui, faute d’autre explication, ont orienté leurs conclusions vers un suicide. Dix ans plus tard, les circonstances de cette mort continuent d’intriguer. Le livre de Camille Kouchner, « la Familia grande », a, sans le vouloir, relancé les spéculations. A la différence de sa sœur Evelyne Pisier – la mère de Camille –, l’actrice a toujours refusé de se taire, moins encore de pardonner l’inceste commis sur son neveu « Victor » par Olivier Duhamel. Dès qu’elle a su, en 2008, elle a raconté l’histoire partout autour d’elle.

A la lumière de ce drame familial, son décès prend une autre résonance : l’actrice élégante, au phrasé si singulier, s’est-elle donné la mort à cause de ce secret, qui l’avait éloignée d’une sœur dont elle était jusque-là inséparable ? Est-ce un assassinat, comme s’en dit convaincu son ami de toujours, le costumier Christian Gasc ? A la différence de Thierry Funck-Brentano, qui n’a pas souhaité nous répondre, aucun ami de Marie-France Pisier ne croit vraiment au suicide. Même incrédulité chez ses deux enfants, Iris et Mathieu, ainsi que chez ses neveux, Camille Kouchner et ses deux frères. Pour ceux-là, la mort de l’actrice, qui s’était remise de deux cancers, est un accident. Plus nuancée, l’écrivaine Marie Lebey parle d’un « acte manqué ».

Nous avons pu consulter l’enquête préliminaire conduite sous la direction du parquet de Toulon. Confrontés à une affaire hors norme, les gendarmes du Var se sont lancés dans des investigations exhaustives, closes en novembre 2012, un an et demi après les faits. Un dossier épais, qui renferme des dizaines d’auditions, des photos des reconstitutions, et permet de retracer les derniers instants de la vie de l’actrice.

Ce week-end-là, Marie-France Pisier ne voulait pas se rendre dans « Le Sud », surnom donné à la maison de Saint-Cyr, à une vingtaine de kilomètres de Toulon. Depuis que Thierry Funck-Brentano, un des principaux dirigeants du groupe Lagardère, a fait construire en 2004 cette bâtisse de 400 mètres carrés, elle ne s’y est jamais vraiment bien sentie. Trop froide, avec son carrelage au sol, ses nombreuses chambres délaissées, sa salle de billard, sa terrasse surmontée d’arches de style romain. « On était tous un peu embarrassés par la grandeur de cette maison. Il y manquait un peu d’âme », admet Christian Gasc. Et puis il y avait cette sciatique qui la tordait de douleur depuis une chute à ski sur les pistes de Courchevel, trois semaines plus tôt. Mais Funck-Brentano avait insisté – il devait faire refaire la terrasse –, et Marie-France avait fini par accepter de l’accompagner. Pour ne pas se sentir seule, elle avait proposé à son amie Sylve Desmeuzes de venir. Mais deux jours avant, celle-ci avait annulé. Météo trop pourrie. « Je n’ai pas eu le courage d’y aller, raconte aujourd’hui Sylve. Je le regretterai toute ma vie… »

« J’ai fait une bêtise de venir ici »

Cette écrivaine, qui a longtemps travaillé à Los Angeles dans le cinéma, se souvient encore de cet appel, le samedi après-midi. « Alors, il pleut ?, demande-t-elle à l’actrice. – Non, sale fille ! Mais rassure-toi, on a une barre de nuages noirs qui arrivent et il va pleuvoir bientôt. » Elles papotent, évoquent les projets de Marie-France : la lecture qu’elle doit faire ce mardi, à Paris, d’une pièce écrite par Pierre Notte ; sa bibliothèque à réorganiser le jeudi ; un week-end à la Mamounia, à Marrakech, où elle a prévu d’accompagner son mari pour un déplacement professionnel. Oui, Marie-France est pleine de projets, se rassurent ses amis, qui savent à quel point cette histoire d’inceste la hante depuis trois ans.

Funck-Brentano s’occupe des travaux, et Marie-France traîne au bord de la piscine, où les chaises en fer forgé de la terrasse ont été déplacées. Elle appelle un centre de thalasso pour un massage : aucun créneau disponible. La veille au soir, elle a voulu se rendre à l’Opéra de Monte-Carlo pour la première de « la Marquise d’O », dont les costumes ont été confectionnés par Christian Gasc, mais sa sciatique l’en a empêchée. Elle se gave d’antidouleur, relit le texte que Pierre Notte a écrit pour elle. L’écrivain lui a donné le rôle de la Mort. « Je suis la Mort qui te regarde en face/Ma charrette fantôme est pleine comme un œuf. » La pièce doit être jouée au théâtre du Rond-Point dans quelques mois.

Marie-France, encore au téléphone. Avec Xavier B., cette fois, un intime, maître de conférences à la retraite. Puis avec Marie Jaoul de Poncheville, une ancienne compagne de Truffaut devenue documentariste. L’actrice se lamente : « J’ai fait une bêtise de venir ici, il fait trop froid et j’ai très mal au dos. » Son amie lui propose de venir la chercher le lendemain pour la ramener à Paris. Marie-France accepte. La douleur se fait plus aiguë, insupportable. En fin de journée, accompagnée de son mari, elle se rend à la pharmacie des Lecques, quartier qui jouxte le front de mer de Saint-Cyr. Achète deux boîtes d’Ixprim, de puissants antalgiques. De retour dans « Le Sud », les époux prennent un apéritif. Whisky pour lui, Campari Perrier pour elle. Des pâtes à l’encre de seiche, et une demi-bouteille de rosé chacun.

La suite de la soirée, c’est Thierry Funck-Brentano qui la raconte aux enquêteurs. Discussion banale, puis il monte se coucher autour de 23 heures/23h30. Marie-France, elle, s’installe devant la télé. L’homme d’affaires dit s’être réveillé peu après 3 heures du matin, ne pas avoir trouvé son épouse près de lui. Les draps n’étaient pas défaits. Il descend. Dans la salle de télé, la lumière est allumée mais l’écran, éteint ; un livre d’Amélie Nothomb sur la table basse. La bouteille de rosé est là, personne n’y a touché depuis le dîner. Il cherche dans les chambres : personne. S’inquiète, imagine qu’elle est peut-être tombée dans le trou creusé dans le jardin pour faire passer la canalisation sous la terrasse. Il allume une lumière extérieure, aperçoit une ombre dans la piscine, à l’endroit le plus profond. « Elle était habillée exactement comme je l’avais laissée en allant me coucher » : pantalon noir, bottines plates. Quand les pompiers sortent le corps de l’actrice, ils découvrent sur elle ses lunettes de vue, ses bijoux, son iPhone.

Une enquête est aussitôt ouverte pour « recherche des causes de la mort ». La personnalité de la victime ainsi que les fonctions occupées par son époux dans le groupe Lagardère – il vient d’être nommé cogérant, un poste stratégique – ne sont pas étrangères à cette célérité. Toutes les hypothèses sont étudiées : un intrus s’est-il introduit dans la propriété ? Aucune trace d’effraction n’est constatée, rien n’a été volé. Les herbes hautes aux abords des grillages n’ont pas été foulées. La brigade nautique côtière du Lavandou inspecte la piscine : pas de trace de lutte. Si le corps de la victime porte des ecchymoses, elles sont attribuées aux pompiers qui ont tenté de la réanimer. Aucune trace de griffures sur son époux.

 

 

 

Plus curieux encore, ni Funck-Brentano ni Frédéric K., le gardien, n’ont entendu aboyer Bouba, le chien du couple aux allures de Saint-Bernard, qui roupille près de la piscine. Frédéric K. est formel : quand Bouba aboie, ses deux chiens l’imitent. Impossible de ne pas les entendre. Si Marie-France Pisier était tombée, il aurait aboyé, c’est sûr à « 90 % », dit-il. Une reconstitution est organisée. Quand un objet tombe, Bouba aboie. Si un homme se jette à l’eau, il aboie également.

Le silence de Bouba la nuit du drame incite les gendarmes à exclure la thèse de l’accident. « Avec ma femme, cela nous laisse à penser que Marie-France aurait pu entrer doucement et volontairement dans l’eau », avance Frédéric K. Mais comment s’y serait-elle prise ? Son corps a été retrouvé coincé dans une chaise, le buste positionné entre l’assise et les croisillons qui relient les pieds. Les gendarmes notent qu’elle était assez petite et fluette pour pouvoir se dégager si elle l’avait voulu… A-t-elle pu marcher ainsi, jusqu’à ne plus avoir pied ? Nouvelle reconstitution avec un homme-grenouille : le mystère reste entier.

Une famille dynamitée

Les résultats de l’autopsie ne sont pas plus conclusifs. L’actrice avait bu, oui, comme tous les soirs d’après les témoignages de ses proches qui évoquent un « alcoolisme mondain ». Mais elle n’était pas ivre (1,63 gramme de taux d’alcoolémie). On retrouve également trace des antidouleurs et la présence ancienne d’antidépresseurs, mais les doses sont loin d’être mortelles. Elle ne s’est pas non plus formellement noyée, seule une faible quantité d’eau est retrouvée dans ses poumons. Les experts formulent une hypothèse : l’association de l’alcool et des médicaments altère les sensations, notamment celles de l’hypoxie (l’étouffement). Marie-France Pisier se serait donc noyée « par inhibition », sans tenter de respirer, sans avaler beaucoup d’eau…

Thierry Funck-Brentano est le seul à accepter la thèse du suicide. Cet homme extrêmement discret, voire secret, est un personnage clé de cette histoire. Il a rencontré Marie-France au début des années 1980. Evelyne Pisier et Olivier Duhamel ont arrangé le « coup ». Evelyne et Marie-France, sœurs fusionnelles ; Olivier et Thierry, cousins, presque « frères », grandis ensemble au Trocadéro et à Sanary-sur-Mer, où les Duhamel possèdent une propriété. Après avoir été l’épouse de l’avocat Georges Kiejman, Marie-France Pisier vient de se séparer du philosophe Bernard-Henri Lévy. Elle est au sommet de sa carrière, incarnation d’une beauté française, racée, primesautière, d’une liberté folle. Vient de tourner coup sur coup « les Sœurs Brontë », de son pygmalion André Téchiné, et « l’Amour en fuite », de Truffaut.

Funck-Brentano, lui, est un bel homme, sportif, calme, présence rassurante, regard enveloppant, apaisant. A l’époque, il travaille à Monaco pour le compte de Jean-Luc Lagardère, dont il est un des lieutenants. « Thierry n’était pas du tout son style, se souvient Sylve Desmeuzes, qui a abrité leurs premières amours dans son appartement de Los Angeles. Elle était plus fascinée par les intellectuels, et en même temps elle avait peur, avec eux, d’être confrontée à ses manques. Avec Thierry, elle s’épanouissait, c’était un type intelligent, mais pas un intellectuel. » Vingt ans durant, les couples Olivier/Evelyne et Thierry/Marie-France sont inséparables, toujours l’un chez l’autre, la semaine à Paris, le week-end dans un château loué près de la capitale, l’été à Sanary. Leur marmaille forme une sorte de tribu.

Le tableau semble idyllique. Marie-France Pisier, pourtant, supporte mal la personnalité envahissante d’Olivier Duhamel, ses réflexions un peu lourdes, ses colères. « Elle le trouvait insupportable, elle lui est toujours rentrée dans le chou, raconte Christian Gasc. Un jour, après avoir appris l’arrivée d’un invité, il s’est adressé à la tablée : “Il va falloir qu’on se serre un peu. Ça va arranger Christian, il aura enfin quelqu’un dans sa chambre.” Marie-France s’est alors levée : “Tu ne parles pas comme ça de mon ami ! Je te demande de lui faire des excuses ! – C’était pour rire. – Ça ne me fait pas rire !” »

Les gosses deviennent adultes, et les couples prennent leurs distances. La construction de la maison de Saint-Cyr, à 10 kilomètres de Sanary, consacre cette rupture. Quatre ans plus tard, la révélation des agissements d’Olivier Duhamel dynamite la famille. Marie-France Pisier est révoltée. La voici en guerre contre Duhamel. A ses proches, elle se dit tantôt fière de Thierry, qui a écrit « une lettre formidable » à Olivier pour rompre avec lui. Tantôt, elle se plaint de son indifférence, de sa façon de fuir le sujet.

C’est dans ce climat que le couple décide de se marier, après trente ans de vie commune. Jusque-là, Marie-France, farouchement indépendante, s’y était refusée. « Tu dois te marier, lui dit un soir Christian Gasc. Au moins pour les enfants. On ne sait jamais ce qui peut arriver. – Mais que peut-il nous arriver ? », répond-elle. Symboliquement, l’acte rattache Thierry Funck-Brentano à Marie-France, l’éloigne des Duhamel. La cérémonie a lieu le 13 juin 2009 à la mairie du 6e arrondissement, place Saint-Sulpice. Seuls sont présents Iris et Mathieu, les enfants du couple, Sylve Desmeuzes et Christian Gasc. La petite troupe part déjeuner au Récamier pour fêter l’événement.

Après le décès de leur mère, Iris et Mathieu sont interrogés. Ils sont formels : ils ne croient pas au suicide. Elle aurait laissé une lettre. Surtout, sa colère contre sa propre mère, morte après avoir avalé des médicaments et dont elle avait découvert le corps, était trop forte pour qu’elle l’imite. Ils rappellent la rancune de Marie-France à l’encontre de son père, suicidé lui aussi, sans laisser d’écrit. « Marie-France avait pris en haine le suicide », confirme aux gendarmes son psychanalyste, qui croit voir dans la mise en scène macabre décrite dans les journaux – la chaise, la piscine… – « l’œuvre d’un psychotique », or Marie-France « ne l’était pas ».

Georges Kiejman est également auditionné. Bouleversé, le premier mari de Marie-France est perplexe, à court d’explications. Rien dans cette mort ne ressemble à la femme qu’il a aimée, puis qu’il a gardée comme amie. « On peut penser à un geste de bravade, par rapport à quoi, je ne sais pas… […] C’est la mort mystérieuse d’une femme très attachante. » Evelyne Pisier, entendue quatre jours après le décès de sa cadette, est peu loquace. « Par rapport à ses antécédents familiaux, je trouve qu’il y a comme un mimétisme, admet-elle. Mais cela ne veut pas dire que Marie-France a mis fin à ses jours. »

De grands noms du cinéma français témoignent à leur tour, comme André Téchiné. « Elle était toujours prête comme un soldat qui va se battre, déclare celui-ci le 27 septembre 2011. Je ne crois pas une seule seconde qu’il s’agisse d’un suicide prémédité. […] A mon avis, la surconsommation d’alcool et la prise de médicaments ont fait qu’elle n’était plus consciente de ce qu’elle faisait. » L’écrivaine Geneviève Brisac parle de son admiration pour cette amie « casse-cou » qui « emmerdait le monde ». Quelques mois avant sa mort, les deux femmes avaient donné une conférence sur la romancière Virginia Woolf, retrouvée morte dans un cours d’eau, les poches lestées de cailloux. Faut-il y voir un lien, demandent les gendarmes ? Brisac coupe court : c’est elle qui a choisi le texte, pas Marie-France.

« Si jamais il m’arrive quelque chose… »

Les consignes données aux gendarmes sont claires, elles ont même été écrites sur une feuille volante : ils doivent pousser les témoins à faire « preuve de franchise ». « La gêne n’a pas sa place », insiste le directeur d’enquête. Pourtant personne n’évoque le secret qui empoisonne l’actrice. Son mari n’en dit pas un mot. Une amie évoque une fâcherie avec sa sœur, sans plus d’explications. Il faut attendre le 29 septembre, et l’audition de Marie Jaoul de Poncheville, pour que ce secret se retrouve couché sur procès-verbal. Marie-France Pisier était « hantée par un terrible secret qui la bouleversait profondément », lâche, d’emblée, la confidente de toujours. Deux ans plus tôt, son neveu « Victor » lui avait confié avoir été abusé sexuellement par son beau-père, Olivier Duhamel. Marie Jaoul de Poncheville se dit prête à fournir des détails dans le cadre d’une procédure distincte. C’est sur la base de ce témoignage qu’une enquête sera ouverte par le parquet de Paris et confiée à la brigade des mineurs.

Nous rencontrons Marie Jaoul de Poncheville dix ans plus tard, dans le loft qu’elle occupe dans le 11e arrondissement de Paris. Marie-France Pisier venait souvent dormir là. Les derniers temps, elle pleurait beaucoup. « Elle était désespérée d’être la seule à vouloir que cette histoire soit dite, la seule à vouloir que “Victor” dépose plainte. Elle souffrait de l’indifférence de ses proches », raconte cette femme que l’actrice surnommait « Pompon ».

« Elle se sentait prisonnière de cette famille ?– Oui, en quelque sorte. Elle savait beaucoup plus de choses qu’elle n’en a dites. »Entre Marie-France et elle, il y avait « un pacte »« Si jamais il m’arrive quelque chose, vous êtes mes soldats », disait Marie-France à ses proches. « Pompon » a voulu honorer le pacte : elle a déposé à la brigade des mineurs le 17 novembre 2011. Un mauvais moment, se souvient-elle : « J’ai été très mal reçuej’avais l’impression qu’ils s’en foutaient. » Entendu peu après, « Victor » refusera de porter plainte. La justice ne cherche pas plus loin. Fin des investigations.

 

Une semaine après sa mort, les intimes de Marie-France Pisier se retrouvent pour l’inhumation, au cimetière de La Guicharde, à Sanary. Les préparatifs tournent à l’affrontement. Ce sont d’abord Evelyne et Gilles Pisier, sœur et frère de la défunte, qui s’emportent quand ils découvrent le nom gravé sur le cercueil : « Marie-France Funck-Brentano ». Le patronyme Pisier sera finalement rajouté par la suite. Puis ce sont les amis de l’actrice qui s’indignent de voir son cercueil enterré dans le caveau des Duhamel/Funck-Brentano. « Elle n’aurait jamais voulu ça ! dit Sylve. Elle n’a jamais beaucoup aimé cette famille. » Nouveau psychodrame quand on annonce que la réception doit avoir lieu dans la propriété d’Olivier Duhamel. Des invités apostrophent Funck-Brentano : « Nous ne viendrons pas, Marie-France ne l’aurait jamais accepté ! » Sous la pression, la collation est déplacée à Saint-Cyr.

Durant l’inhumation, Olivier Duhamel se tient à l’entrée du cimetière, à l’écart. « On aurait dit qu’il se cachait », se souvient Marie Jaoul de Poncheville. Peut-être se méfiait-il déjà de la fureur des morts.

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