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Chez Jeannette Fleurs

“Je m'intéresse à tout, je n'y peux rien.” Paul Valéry. Poussez la porte de la boutique : plus de 1.700 articles.

Jacques Chirac et le discours du Vel d'Hiv.

La France, patrie des Lumières et des Droits de l’Homme, terre d’accueil et d’asile, la France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux.

Le 16 juillet 1995, alors qu'il est élu Président de la République depuis seulement deux mois, Jacques Chirac s'exprime au Square des martyrs du Vel d'Hiv, à Paris : pour la première fois, un président reconnaît la responsabilité de la France dans les déportations de juifs.

Il se démarque clairement de son prédécesseur François Mitterand qui s'y était toujours refusé. "Je ne ferai pas d'excuses au nom de la France. La République n'a rien à voir avec ça. J'estime que la France n'est pas responsable", avait affirmé l'ancien président socialiste en 1994.

……………...

Monsieur le Maire,

Monsieur le Président,

Monsieur l’Ambassadeur,

Monsieur le Grand Rabbin,

Mesdames, Messieurs,

Il est, dans la vie d’une nation, des moments qui blessent la mémoire, et l’idée que l’on se fait de son pays.

Ces moments, il est difficile de les évoquer, parce que l’on ne sait pas toujours trouver les mots justes pour rappeler l’horreur, pour dire le chagrin de celles et ceux qui ont vécu la tragédie. Celles et ceux qui sont marqués à jamais dans leur âme et dans leur chair par le souvenir de ces journées de larmes et de honte.

Il est difficile de les évoquer, aussi, parce que ces heures noires souillent à jamais notre histoire, et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français.

Il y a cinquante-trois ans, le 16 juillet 1942, 450 policiers et gendarmes français, sous l’autorité de leurs chefs, répondaient aux exigences des nazis.

Ce jour-là, dans la capitale et en région parisienne, près de dix mille hommes, femmes et enfants juifs furent arrêtés à leur domicile, au petit matin, et rassemblés dans les commissariats de police.

On verra des scènes atroces : les familles déchirées, les mères séparées de leurs enfants, les vieillards — dont certains, anciens combattants de la Grande Guerre, avaient versé leur sang pour la France — jetés sans ménagement dans les bus parisiens et les fourgons de la Préfecture de Police.

On verra, aussi, des policiers fermer les yeux, permettant ainsi quelques évasions.

Pour toutes ces personnes arrêtées, commence alors le long et douloureux voyage vers l’enfer. Combien d’entre-elles ne reverront jamais leur foyer ? Et combien, à cet instant, se sont senties trahies ? Quelle a été leur détresse ?

La France, patrie des Lumières et des Droits de l’Homme, terre d’accueil et d’asile, la France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux.

Conduites au Vélodrome d’hiver, les victimes devaient attendre plusieurs jours, dans les conditions terribles que l’on sait, d’être dirigées sur l’un des camps de transit — Pithiviers ou Beaune-la-Rolande — ouverts par les autorités de Vichy.

L’horreur, pourtant, ne faisait que commencer.

Suivront d’autres rafles, d’autres arrestations. À Paris et en province. Soixante-quatorze trains partiront vers Auschwitz. Soixante-seize mille déportés juifs de France n’en reviendront pas.

Nous conservons à leur égard une dette imprescriptible.

La Thora fait à chaque juif devoir de se souvenir. Une phrase revient toujours qui dit : « N’oublie jamais que tu as été un étranger et un esclave en terre de Pharaon ».

Cinquante ans après, fidèle à sa loi, mais sans esprit de haine ou de vengeance, la Communauté juive se souvient, et toute la France avec elle. Pour que vivent les six millions de martyrs de la Shoah. Pour que de telles atrocités ne se reproduisent jamais plus. Pour que le sang de l’holocauste devienne, selon le mot de Samuel Pisar, le « sang de l’espoir ».

Quand souffle l’esprit de haine, avivé ici par les intégrismes, alimenté là par la peur et l’exclusion. Quand à nos portes, ici même, certains groupuscules, certaines publications, certains enseignements, certains partis politiques se révèlent porteurs, de manière plus ou moins ouverte, d’une idéologie raciste et antisémite, alors cet esprit de vigilance qui vous anime, qui nous anime, doit se manifester avec plus de force que jamais.

En la matière, rien n’est insignifiant, rien n’est banal, rien n’est dissociable. Les crimes racistes, la défense de thèses révisionnistes, les provocations en tout genre — les petites phrases, les bons mots — puisent aux mêmes sources.

Transmettre la mémoire du peuple juif, des souffrances et des camps. Témoigner encore et encore. Reconnaître les fautes du passé, et les fautes commises par l’État. Ne rien occulter des heures sombres de notre Histoire, c’est tout simplement défendre une idée de l’Homme, de sa liberté et de sa dignité. C’est lutter contre les forces obscures, sans cesse à l’œuvre.

Cet incessant combat est le mien autant qu’il est le vôtre.

Les plus jeunes d’entre nous, j’en suis heureux, sont sensibles à tout ce qui se rapporte à la Shoah. Ils veulent savoir. Et avec eux, désormais, de plus en plus de Français décidés à regarder bien en face leur passé.

La France, nous le savons tous, n’est nullement un pays antisémite.

En cet instant de recueillement et de souvenir, je veux faire le choix de l’espoir.

Je veux me souvenir que cet été 1942, qui révèle le vrai visage de la « collaboration », dont le caractère raciste, après les lois anti-juives de 1940, ne fait plus de doute, sera, pour beaucoup de nos compatriotes, celui du sursaut, le point de départ d’un vaste mouvement de résistance.

Je veux me souvenir de toutes les familles juives traquées, soustraites aux recherches impitoyables de l’occupant et de la milice, par l’action héroïque et fraternelle de nombreuses familles françaises.

J’aime à penser qu’un mois plus tôt, à Bir Hakeim, les Français libres de Koenig avaient héroïquement tenu, deux semaines durant, face aux divisions allemandes et italiennes.

Certes, il y a les erreurs commises, il y a les fautes, il y a une faute collective. Mais il y a aussi la France, une certaine idée de la France, droite, généreuse, fidèle à ses traditions, à son génie. Cette France n’a jamais été à Vichy. Elle n’est plus, et depuis longtemps, à Paris. Elle est dans les sables libyens et partout où se battent des Français libres. Elle est à Londres, incarnée par le Général de Gaulle. Elle est présente, une et indivisible, dans le cœur de ces Français, ces « Justes parmi les nations » qui, au plus noir de la tourmente, en sauvant au péril de leur vie, comme l’écrit Serge Klarsfeld, les trois-quarts de la communauté juive résidant en France, ont donné vie à ce qu’elle a de meilleur. Les valeurs humanistes, les valeurs de liberté, de justice, de tolérance qui fondent l’identité française et nous obligent pour l’avenir.

Ces valeurs, celles qui fondent nos démocraties, sont aujourd’hui bafouées en Europe même, sous nos yeux, par les adeptes de la « purification ethnique ». Sachons tirer les leçons de l’Histoire. N’acceptons pas d’être les témoins passifs, ou les complices, de l’inacceptable.

C’est le sens de l’appel que j’ai lancé à nos principaux partenaires, à Londres, à Washington, à Bonn. Si nous le voulons, ensemble nous pouvons donner un coup d’arrêt à une entreprise qui détruit nos valeurs et qui, de proche en proche risque de menacer l’Europe tout entière.

……………………

J'ai entendu des extraits de ce discours lors de la cérémonie des Justes à Lormaye.

Ne pas oublier que nous devons également à Jacques Chirac l'entrée des Justes au Panthéon.

Le 18 janvier 2007

 

Monsieur le Premier ministre,
Monsieur le président du Sénat,
Monsieur le président de l'Assemblée nationale,
Mesdames et messieurs les ministres,
Messieurs les Premiers ministres,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Madame la présidente de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, chère Simone Veil, à qui nous devons cette cérémonie,
Monsieur le président de Yad Vashem,
Monsieur le Grand Rabbin de France,
Mesdames et messieurs,

Il y a 65 ans, dans l'Europe presque entièrement asservie, la barbarie nazie décide l'exécution de la solution finale. Une idéologie effroyable fait régner la terreur : une idéologie raciste, fondée sur cette croyance criminelle et folle selon laquelle certains hommes seraient par nature "supérieurs" à d'autres. Et cela, au cœur d'un continent qui se considère comme l'aboutissement même de la civilisation...

Innombrables sont celles et ceux que les nazis condamnent à mort a priori, à cause de leur origine, comme les Tziganes, à cause de leurs convictions religieuses ou politiques, de leurs préférences sexuelles, ou de leur handicap. Mais c'est contre les Juifs que se déchaîne avec le plus de cruauté et de violence systématique la folie nazie. Ce sont eux qui payent le tribut le plus effrayant : six millions d'êtres humains assassinés dans des conditions inexprimables. La quasi-disparition des Juifs d'Europe. La Shoah. Comme dans un cauchemar, l'Occident se trouve renvoyé aux temps les plus noirs de la barbarie. À travers la destruction des Juifs, c'est au fond toute la civilisation judéo-chrétienne, toute la civilisation européenne, vieille de plusieurs millénaires, qu'Hitler veut abattre : l'invention à Athènes de la démocratie, l'éclosion à Rome d'une civilisation fondée sur le droit, le message humaniste des Lumières du XVIIIe siècle.

En France même, le pays des Lumières et des droits de l'Homme, le pays où tant de grands hommes se sont levés pour l'honneur du capitaine Dreyfus, le pays qui a porté Léon Blum à la tête du gouvernement, en France, un sombre linceul de résignation, de lâcheté, de compromissions recouvre les couleurs de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Le pouvoir de Vichy se déshonore, édictant de sa propre initiative, dès le 3 octobre 1940, le sinistre Statut des Juifs, qui les exclut de presque toutes les fonctions. Les Juifs de France sont d'autant plus stupéfaits de cet antisémitisme d'État que leur pays est celui qui le premier en Europe, dès 1791, leur a accordé les droits des citoyens. Ils aiment leur pays avec passion. Ils se sont battus pour lui, comme Marc Bloch et tant d'autres, en 1914 ou en 1939 : soudain, devant leurs yeux incrédules, la République abdique, rend les armes à Pétain et à Laval, cède la place à une clique revancharde et haineuse.

Voilà 65 ans, en France, il y a la honte du premier convoi de déportation, le 27 mars 1942. Il y a l'ordonnance allemande du 7 juin et l'ignominie de l'étoile jaune. Il y a le crime irréparable du Vel d'Hiv', les 16 et 17 juillet. Il y a, du 26 au 28 août, la rafle de milliers de Juifs étrangers en zone libre.

Mesdames et Messieurs,

Il y a les ténèbres. Mais il y a aussi la lumière. La France affamée, terrorisée, coupée en deux par la ligne de démarcation, est étourdie par l'ampleur de la défaite. Mais très vite, des voix s'élèvent. Dès le 11 novembre 1940, de Gaulle écrit de Libreville au Congrès juif mondial que le statut des Juifs n'aura aucune validité dans la France libre. Il fustige la violation, par Vichy, je le cite : "des principes de liberté et de justice égale, sur lesquels la République française était fondée". Puis, dans le pire effondrement de notre histoire, alors même que la Wehrmacht semble encore invincible, des Françaises et des Français en très grand nombre vont montrer que les valeurs de l'humanisme sont enracinées dans leurs âmes. Partout, ils accueillent, cachent, sauvent au péril de leur vie des enfants, des femmes, des hommes, persécutés parce qu'ils sont Juifs. Dans ce cauchemar éveillé que les Juifs vivent depuis 1940, la France, leur France, à laquelle ils ont cru si intensément, n'a pas tout à fait disparu. Dans les profondeurs du pays, une lueur d'espoir se fait jour. Elle est fragile, vacillante. Mais elle existe.

Il y a cette secrétaire de mairie qui fournit des papiers à des familles juives, et convainc les habitants du village de partager leurs tickets d'alimentation : le courage d'une seule personne a cristallisé la générosité de tous. Il y a ce couple d'hôteliers qui trouve sur le pas de sa porte un homme échappé d'une rafle, affamé et épuisé : ils l'hébergent pendant deux de ces années terribles. Il y a ce boulanger qui reconnaît un adolescent arrêté et avertit la direction de son école : prévenu, un officier de gendarmerie, membre de la Résistance, libère le jeune homme. Grâce à cette chaîne humaine de solidarité et de courage, une vie est sauvée. Il y a ce professeur de latin qui, jusqu'au bout, tente de protéger l'élève qu'il a présenté au concours général. Il y a cette concierge qui entend le crissement des freins des camions allemands, et fait le tour très rapidement des occupants juifs de son immeuble pour leur dire surtout de rester silencieux derrière leurs portes closes, et les sauve ainsi de la déportation. Il y a le pasteur Trocmé, qui entraîne avec lui, dans l'accueil de centaines de Juifs en fuite, tout un village, tout un plateau de Haute-Loire : Le Chambon-sur-Lignon, dont le nom résonne aujourd'hui, et pour toujours, dans nos cœurs. Il y a ces sœurs qui abritent, dans leurs couvents, dans leurs pensionnats, des enfants juifs. Il y a ces curés savoyards, devenus par la force des choses passeurs professionnels, qui emmènent les réfugiés de l'autre côté de la frontière. Il y a ce général commandant une région militaire qui refuse de prêter sa troupe pour surveiller l'embarquement de déportés, ce qui lui vaut une révocation immédiate. Il y a tous ces paysans, que nous a montrés avec tant d'émotion Agnès Varda, qui accueillent, aiment et protègent de si nombreux enfants. Il y en a tant et tant d'autres, dans toutes les classes sociales, dans toutes les professions, de toutes les convictions. Des milliers de Françaises et de Français, qui sans s'interroger, font le choix du bien. Quel courage, quelle grandeur d'âme il leur a fallu ! Tous connaissaient les risques encourus : l'irruption brutale de la Gestapo. L'interrogatoire. La torture. Parfois même, la déportation et la mort.

Certains furent reconnus Justes parmi les nations. D'autres resteront anonymes, soit qu'ils aient laissé leur vie en aidant l'autre, soit que, dans leur modestie, ils n'aient même pas songé à faire valoir leurs actes. Certains sont ici aujourd'hui, ainsi que celles et ceux qu'ils ont sauvés. Je les salue tous, avec un infini respect. En France, grâce à cette solidarité agissante, selon le beau mot de Serge Klarsfeld, les Justes ont contribué à protéger les trois quarts de la population juive d'avant-guerre de la déportation, c'est-à-dire d'une mort presque certaine : sur plus de 75 000 déportés, seuls revinrent quelque 2 500 survivants. Et après quelles souffrances indicibles : vous pouvez en témoigner, chère Simone Veil, vous dont le courage, en toute circonstance, est un exemple pour la France. La majorité des Juifs assassinés ont été livrés aux Allemands par Vichy et par les collaborateurs. Mais la plupart des Juifs sauvés le furent par des Français.

Aujourd'hui, pour cet hommage de la nation aux Justes de France, reconnus ou anonymes, nous sommes rassemblés pour évoquer notre passé, mais aussi pour enrichir notre présent et notre avenir. "Quiconque sauve une vie sauve l'univers tout entier", dit le Talmud, devise qui d'ailleurs orne la médaille des Justes. Il faut en comprendre toute la force : en sauvant une personne, chaque Juste a en quelque sorte sauvé l'humanité. Cette mémoire, soyez-en certains, soyez-en fiers, elle perdurera de génération en génération. Par ce geste, vous nous incitez aussi à interroger notre conscience. Qu'est-ce qui fait que, confronté à un choix crucial, quelqu'un agit selon son devoir, c'est-à-dire en considérant l'autre pour ce qu'il est, une personne humaine avant tout ? Pour certains Justes, c'est une question de conviction religieuse, et ceux-là, n'en doutons pas, entendent le message de l'Église dans sa vraie vérité. D'autres, parfois les mêmes, appartiennent à des groupes longtemps opprimés, comme les protestants, ou sont viscéralement hostiles à la politique de Vichy pour des raisons notamment politiques. Mais, pour tous, c'est une réaction venue du plus profond du cœur, expression la plus haute de ce que l'on nomme la charité.

Toutes et tous, ils ont eu, vous avez eu le courage de voir et de comprendre la détresse avec les yeux du cœur. Ce courage anime Monseigneur Saliège, archevêque de Toulouse, qui a été pour beaucoup dans la prise de conscience des catholiques de France. Infirme, reclus dans son palais épiscopal, il sait pourtant rendre concrètes, dans son admirable lettre pastorale, les souffrances injustifiables endurées par des êtres coupables du seul crime d'être nés. Ce courage de voir et de comprendre avec les yeux du cœur, on le trouve partout : chez ce voisin d'immeuble, que l'on connaît à peine et qui, sans poser de question, accueille votre famille alors que la milice frappe aux portes.

Vous, Justes de France, vous avez transmis à la nation un message essentiel, pour aujourd'hui et pour demain : le refus de l'indifférence, de l'aveuglement. L'affirmation dans les faits que les valeurs ne sont pas des principes désincarnés, mais qu'elles s'imposent quand une situation concrète se présente et que l'on sait ouvrir les yeux.

Plus que jamais, nous devons écouter votre message : le combat pour la tolérance et la fraternité, contre l'antisémitisme, les discriminations, le racisme, tous les racismes, est un combat toujours recommencé. Si l'antisémitisme s'est déchaîné dans les années 1930-1940, c'est faute d'avoir été condamné avec la fermeté nécessaire à cette époque. C'est parce qu'il a été en quelque sorte toléré comme une opinion parmi d'autres. Telle est la leçon de ces années noires : si l'on transige avec l'extrémisme, il faut bien le mesurer, on lui offre un terreau pour prospérer, et tôt ou tard on en paye le prix. Face à l'extrémisme, il n'y a qu'une attitude : le refus, l'intransigeance. Et c'est aussi sans merci qu'il faut lutter contre le négationnisme, crime contre la vérité, perversion absolue de l'âme et de l'esprit, forme la plus ignoble, la plus abjecte de l'antisémitisme.

Mesdames et Messieurs,

Les Justes ont fait le choix de la fraternité et de la solidarité. Ils incarnent l'essence même de l'homme : le libre arbitre. La liberté de choisir entre le bien et le mal, selon sa conscience. À tous, en ce lieu où elle honore ses grands hommes, la nation rend aujourd'hui le témoignage de son respect et de son estime. Vous incarnez aussi la France dans ce qu'elle a de plus universel, dans la fidélité aux principes qui la constituent. Grâce à vous, grâce à d'autres héros à travers les siècles, nous pouvons regarder la France au fond des yeux, et notre histoire en face : parfois, on y voit des moments profondément obscurs. Mais on y voit aussi et surtout le meilleur et le plus glorieux. Notre histoire, il faut la prendre comme un bloc. Elle est notre héritage, elle est notre identité. C'est à partir d'elle, et en traçant de nouveaux chemins, que nous pouvons nous engager tête haute dans les voies de l'avenir. Oui, nous pouvons être fiers de notre histoire ! Oui, nous pouvons être fiers d'être Français !

Ce que nous enseignent aussi l'effondrement de la République en juin 1940, l'illusion tragique du recours à Pétain et le déshonneur de Vichy, c'est à quel point une nation est fragile. Dans le confort de nos certitudes d'aujourd'hui, beaucoup ont le sentiment que la France est éternelle, que la démocratie est naturelle, que la solidarité et la fraternité peuvent se résumer au système de sécurité sociale. Dans une société qui, malgré ses difficultés, est prospère et stable, l'idée du bonheur semble trop souvent se ramener à la satisfaction de besoins matériels. Nous devons entendre votre message. Une nation, c'est une communauté de femmes et d'hommes solidaires, liés par des valeurs et un destin communs. Chacun est dépositaire d'une parcelle de la communauté nationale, et celle-ci n'existe que si chacun s'en sent profondément responsable. À un moment où montent l'individualisme et la tentation des antagonismes, ce que nous devons voir, dans le miroir que nous tend le visage de chaque être humain, ce n'est pas sa différence, mais c'est ce qu'il y a d'universel en lui. À ceux qui s'interrogent sur ce que c'est d'être Français, à ceux qui s'interrogent sur ce que sont les valeurs universelles de la France, vous, les Justes, avez apporté la plus magnifique des réponses, au moment le plus noir de notre histoire.

Et au nom de la France, au nom de la nation tout entière, je m'incline aujourd'hui devant vous avec respect et reconnaissance.

………………….

Voilà……….

C'est ma façon à moi de rendre hommage.

En ce dimanche 29 septembre.

Jour de l'hommage populaire des Français à Jacques Chirac.

 

Liliane Langellier

 

 

Jacques Chirac au Vel d'Hiv.

Jacques Chirac au Vel d'Hiv.

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