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22 Août 2018
Les livres sont comme les enfants.
Les plus chers sont toujours ceux qu’on a le plus attendus.
Et, celui-là, on peut dire que je l’ai attendu.
Un coursier TNT analphabète ou camé (ou les deux) m’a privée de la joie d’un 16 août.
La bourde est aujourd'hui rattrapée...
Vanessa Schneider…
Je la connais, bien sûr, cette journaliste du Monde.
Elle est du trio des premières de la classe : Raphaëlle Bacqué, Ariane Chemin (Oui, l’affaire Benalla, c’est elle) et… Vanessa Schneider.
On croise parfois sa fine silhouette et ses longs cheveux noirs sagement attachés en chignon au détour d’un C dans l’air…
Dès que j’ai su que son roman allait paraître…
J’ai su que j’allais l’aimer.
Maria Schneider…
Je n’avais pas encore 25 ans et j’étais déjà sagement mariée quand son film brûlot : « Un dernier Tango à Paris » de Bertolucci est sorti sur les écrans.
Woodstock avait à peine 2 ans.
Un certain docteur publiait son manifeste « Faisons l’amour, faisons la fête »…
On fréquentait les nuits du Palace.
Les soirées bizarres à Paris.
Et des êtres brillants autant que tourmentés affirmaient à n’en plus finir la fierté de leur sexualité décousue.
Mai 68 était déjà enterré et ne restait alors que les lourdes vestes afghanes en souvenir d’une fuite éperdue vers l’Orient.
Entre Fête de L’Huma et guerre du Vietnam, l’élite de la nation avait les cheveux longs.
Maria Schneider…
Elle était longue, brune, frisée, avec des seins lourds et de fines chevilles.
Les hommes, pour l’avoir trop désirée, l’ont violée sur pellicule.
Cette histoire de sodomie au beurre est ancrée à jamais dans la mythologie des seventies.
Dans la mienne aussi.
Et dans celle de Vanessa Schneider.
La petite fille sage de la barre du 13ème…
Celle dont les parents sont hippies comme nous le fûmes…
Les histoires se confondent un peu.
Maria la camée, Vanessa la trop sage…
Maria sans famille, Vanessa très encadrée…
Maria au père absent, Vanessa au père très présent…
Reste l’attachement viscéral de la petite fille pour sa grande cousine…
Celle qui se grattait convulsivement les piqures des bras pour trop de dope…
Qui pleurait de se faire voler sa Mobylette bleue…
Qui parlait trop, qui riait trop fort…
Entre hospitalisations à Sainte-Anne et ultime coupe de champagne…
Vanessa Schneider nous emporte dans un voyage doux et brutal, à l’aune de son héroïne.
« Les acteurs sont des enfants perdus, m’a dit un jour mon amie Laure qui sait de quoi elle parle. »
Que Vanessa Schneider se rassure, le livre une fois fermé, Maria n’est pas perdue mais elle est retrouvée.
Et flotte pour l’éternité la plus belle image de Maria Schneider.
Bien avant la scène du viol de Bertolucci.
Celle d’une jeune fille trop belle, trop jeune, trop pressée…
Et qui rêvait de faire du cinéma.
Liliane Langellier
Tu t’appelais Maria Schneider
Vanessa Schneider
Grasset.
19 €.